La nouvelle proposition pour créer "un espace européen des données de santé" (The European Health Data Space, EHDS) a été faite par la commission européenne.
Il s'agit de la première législation sectorielle qui s'appuie sur la loi de la gouvernance des données -Data Governance Act-. Avant de devenir définitif, le texte devra être approuvé par le Conseil et le Parlement européen.
Avec quel objectif ?
L'objectif de ce texte est d'améliorer les échanges et l'accès à différents types de données sur la santé (dossiers médicaux électroniques, données génomiques, données issues de registres de patients…) afin de soutenir la fourniture de soins de santé (utilisation primaire des données) mais aussi la recherche sur la santé et l’élaboration de politiques en la matière (utilisation secondaire des données).
Le projet prévoit que les citoyens européens puissent gratuitement accéder à "un ensemble minimal de données de santé primaires (informations spécifiquement collectées pour étudier un phénomène particulier, telles que celles relatives aux vaccins, aux ordonnances électroniques, aux résultats des analyses de laboratoires ou encore aux rapports de sortie d'hôpitaux.
Cet accès doit permettre de renforcer "le droit des patients à contrôler" leurs informations médicales. Ils auront également le droit de restreindre leurs accès ou de les partager gratuitement avec des tiers.
Mieux encadrer la réutilisation des données médicales.
A travers ce texte, la Commission européenne souhaite aussi et surtout encadrer la réutilisation dite "secondaire" des données, à des fins autres que celles pour lesquelles elles ont été initialement collectées. Cette réutilisation couvre les dossiers médicaux, les données sociales, administratives, biomédicales génétiques et génomiques, les registres publics, les études cliniques et les questionnaires de recherche.
Seront interdites les transmissions de ces données à des tiers dans un but commercial ou juridique néfaste tels que pour les primes d'assurance, la publicité, la vente de données à des tiers.
Seront autorisées les données de soutien aux autorités publiques dans l'exécution de leurs tâches, l'éducation, la recherche scientifique, le développement de solutions innovantes à des fins d'intérêts publics, ainsi que le développement d'algorithmes pour des applications médicales.
Ce texte a pour objectif de créer un cadre de partage des données santé en établissant "des règles claires, des normes et pratiques communes, des infrastructures et un cadre de gouvernance. Stella Kyriakides, commissaire à la santé et à la sécurité alimentaire.
Pour encadrer ces nouveaux échanges, la Commission européenne prévoit de créer une entité spécialisée : l'European Digital and Health Data Board, qui devra notamment gérer les demandes d'accès aux données dites secondaires.
Quelles articulations avec les espaces de santé actuels privés/publics?
Grâce à l'EHDS, les citoyens auront accès immédiatement et gratuitement à leurs données de santé sous forme électronique (prescriptions, résultats de laboratoire, lettre de sortie d'hospitalisation, comptes rendus d'imagerie médicale, etc...) et ils pourront les partager avec des professionnels de santé.
La véritable question est de savoir comment ce dispositif européen va s’articuler avec "mon espace santé", le nouveau dossier médical partagé français. La question est aussi de savoir comment des entreprises de droit privé, comme Doctolib, la plateforme de RDV médicaux vont s'y conformer.
Rappelons à ce titre que Doctolib, a déjà mis en place depuis un certain temps le partage en ligne de prescriptions, de compte rendu d’imagerie et de résultats de laboratoires des patients vers des professionnels de santé, et ce, sur une infrastructure de cloud public (de droit américain), sans que ces échanges aient été préalablement encadrés par le DGA.
La confiance et la sécurité informatique doivent irriguer ce futur espace de données de santé.
La réponse est d'ores et déjà apportée par la commission européenne qui soutient que
s'agissant de données particulièrement sensibles, les dispositions du Règlement Général sur la protection des données (RGPD) vont de facto s’appliquer. Et de préciser que "les traitements de données ne peuvent avoir lieu que dans des environnements de traitement sécurisés qui doivent respecter des normes très élevées de confidentialité".
Rappelons que l'enjeu économique du EHDS est de taille. La Commission européenne prévoit d'injecter plus de 810 millions d'euros dans ce projet (280 millions dans le cadre du programme EU4Health et le reste par le programme pour une Europe numérique
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